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Il est dans nos habitudes, à la mi-janvier, de nous retrouver pour un weekend au chalet de Billens. En plus d’une fondue conviviale et joyeuse, l’objectif est avant tout d’initier les nouveaux venus, et nos amis invités, à la technique du ski de randonnée et de répéter des gestes qui se révèlent être d’une importance majeure, sinon vitale, en cas d’accidents, principalement d’avalanche.

Cette année, l’hiver a tardé à nous envoyer son lot de flocons. Désespérément, notre âme de skieur a scruté le ciel et attendu dans l’angoisse l’arrivée conjointe des perturbations météo et du froid, qui hélas arrivaient chaque fois en ordre dispersé. Ainsi, jusqu’au passage de l’an, ce ne fut que pluie, froid ensoleillé ou neige éparse accompagnée de foehn. Le Nouvel An cependant était sous une belle couche de neige, le soleil étant de la partie le premier jour, suivi d’une abondante pluie le lendemain laissant même les abords du chalet boueux. De guerre lasse, on se préparait à rechercher nos fictives victimes d’avalanche, sous les branches basses des arbres et les tapis de feuilles mortes, enlevant du même coup du réalisme et de la conviction à nos exercices. C’était sans compter sur la chance, qui parfois nous sourit aussi, comme quand on gagne à la loterie, ce qui ajoute du bonheur et nous aide dans cette vie un peu lourde, surtout quand le soleil tarde à se lever pour éblouir nos sombres journées.

Mais là, on gagne un lot. Pas encore le gros, mais un froid vif maintient néanmoins dans un état très léger soixante centimètres d’une couche crémeuse et volatile. Le fond irrégulier, rugueux, garde bien palpable le façonnage des sabots des lourds bovidés estivants, écrasant l’herbe tendre et les narcisses parfumés, en formant comme des marches perpendiculaires à la pente. Pour le skieur, aujourd’hui ce sera les skis au fond et un nuage de flocons dans les yeux. On n’est pas loin du bonheur ; les secousses irrégulières et violentes dans les mollets nous rappelant simplement que le Nirvana n’est que quelques dizaines de centimètres plus haut et qu’à défaut d’olivier, un rameau d’églantier pourrait bien entraver notre virage et marquer de manière définitive nos beaux habits high-tech colorés. Restons zen ; Ô mani.

Au petit matin, quoique bien avancé déjà, un observateur extérieur serait bien surpris de nous voir grimper à l’arbre à la manière de l’araignée pendue à son fil. Cependant, l’homme étant doté d’une intelligence qui, comparativement, alourdit son cerveau beaucoup plus que la petite bébête, la progression nous apparait beaucoup moins aisée, moins rapide, très nettement moins efficace. La leçon de ces histoires est qu’il vaut mieux éviter de tomber dans un trou lorsqu’on est incapable de grimper à la corde comme un fakir des « Cigares du Pharaon » et de skier quand le manteau neigeux est insuffisant pour bien nous porter, tout en restant en place lui-même ; CQFD.

Notre terrain de jeu du jour est situé sur les pentes du Folly et du Molard, avec l’espoir fou et inavouable que les myrtillers et rhododendrons  seront suffisamment recouverts pour ne pas nous y prendre les spatules. De fait, ça passera, même à travers les vernes denses, avec juste quelques profondes rides aux semelles, histoire d’en garder des émotions bien vivaces.

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